Le Projet de Loi de Financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025, actuellement en débat à l'Assemblée nationale, vise une nouvelle série de mesures pour freiner le déficit croissant de la Sécurité sociale, qui devrait atteindre 18 milliards d’euros en 2024. Parmi les propositions figure celle d’une journée de carence d’ordre public, soutenue par le député Yannick Neuder, rapporteur général du budget de la Sécu, dans l’objectif affiché de responsabiliser les salariés et de réduire les coûts pour les employeurs. Un tour d’horizon des enjeux de cette mesure.
Une journée de carence pour limiter les arrêts de travail
Actuellement, le secteur privé impose un délai de carence de 3 jours pour les arrêts maladie, financé en grande partie par les entreprises, tandis que le secteur public en compte un seul. Cependant, la nouvelle journée de carence d’ordre public serait financée par les salariés eux-mêmes, une mesure que Yannick Neuder qualifie de responsabilisante pour les employés.
Le député propose également d’instaurer un système d'auto-déclaration des arrêts de courte durée. Cette disposition permettrait aux salariés de déclarer eux-mêmes leurs arrêts, sans passer par un médecin, afin de libérer du temps pour les professionnels de santé. Cette idée trouve écho dans un rapport de la Cour des comptes publié en mai, qui préconisait de supprimer les certificats médicaux pour les arrêts de très courte durée afin de simplifier la démarche et d’alléger la charge médicale.
Une alternative à la réduction des indemnités journalières de Sécurité Sociale (IJSS)
Le Gouvernement propose aussi, dans le cadre du PLFSS, de réduire le plafond de rémunération pris en compte pour le calcul des IJSS maladie de 1,8 SMIC à 1,4 SMIC. Cette baisse pourrait générer une économie d’environ 600 millions d’euros mais impacterait directement les salariés touchant un salaire brut supérieur à ce seuil.
Face à cette réduction, le jour de carence d’ordre public pourrait apparaître comme une alternative moins lourde pour les salariés. Cependant, dans les cas d'arrêt de courte durée, l'obligation faite aux employeurs de maintenir, sous certaines conditions, le salaire de leurs employés via des dispositifs d'indemnisation complémentaire, reste inchangée. Le coût pourrait donc être supporté par les entreprises, surtout dans les cas où les conventions collectives renforcent cette obligation.
Une journée de carence suffisante pour freiner la croissance des arrêts maladie ?
Le nombre d’arrêts maladie est en forte augmentation depuis une décennie, passant de 6,4 millions il y a dix ans à 8,8 millions en 2022. Ces chiffres traduisent une pression budgétaire croissante sur la Sécurité sociale. Pourtant, l’impact d’un jour de carence sur la réduction de ces arrêts reste incertain.
En effet, cette mesure ne ciblerait pas les arrêts maladie de longue durée, qui représentent une part importante des dépenses. Selon un rapport de la Cour des comptes de 2019, 3% des arrêts de plus d’un an représentent à eux seuls 24% des dépenses totales. Dès lors, une journée de carence imposée pour les arrêts de courte durée pourrait s’avérer peu efficace pour traiter les racines financières du problème.
Quelles perspectives pour le PLFSS 2025 ?
La proposition d’un jour de carence d’ordre public reflète la volonté de l’État de partager la responsabilité financière des arrêts de travail avec les salariés, tout en limitant les dépenses de la Sécurité sociale. Toutefois, son efficacité sur les arrêts longue durée reste limitée, et son impact sur les entreprises devra être évalué de près.
Le PLFSS 2025 ouvre ainsi la voie à des ajustements dans le financement de la protection sociale en France, qui devront trouver un équilibre entre soutien aux salariés, incitation à la prudence dans les arrêts de travail, et maîtrise des dépenses publiques.